Toute embarcation désirant rejoindre la péninsule de l'Antarctique
depuis le port d'Ushuaia doit obligatoirement traverser le passage de
Drake, lieu de rencontre entre les océans Atlantique et Pacifique,
seul endroit au monde où les eaux ne sont freinées par aucune
terre, produisant des vents de la force d'un ouragan et d'énormes
vagues de 10 mètres de hauteurs. Les eaux les plus brutales de
la planète.
48 heures.
48 heures pour effectuer mille kilomètres dans une mer agitée.
Les immenses vagues d'une énorme amplitude et les vents contraires,
rendant folle la girouette du bateau, ballotent le solide Akademik Ioffe
bâbord-tribord pour le plus grand plaisir de notre estomac (surtout
celui de Sam !). Les comprimés de Dramamine permettant normalement
de lutter efficacement contre le mal de mer se révèlent
dans ce couloir mythique inutiles pour la plupart d'entre nous. Nous nous
allongeons dans nos petites couchettes confortables, fermons les yeux
et au lieu de céder à la sensation d'être malmenés
comme dans un tambour de machine à laver, nous essayons de nous
imaginer sur le dos d'un albatros, virevoltant dans le vent, plongeant
brusquement pour raser les eaux tourmentées, seul oiseau capable
d'affronter de tels éléments avec tant d'élégance
et de maîtrise.
Aujourd'hui, les embarcations reliant le Pacifique à l'Atlantique
évitent à tout prix ce passage et préfèrent
emprunter le canal de Beagle aux eaux bien plus calmes.