-"Gracias, gracias."

Cette émouvante mamie à un visage minuscule et de petits yeux fatigués de vivre dans la rue, tristes de solitude.
Je lui caresse la joue alors qu'elle se confond encore en remerciements.
Ce geste doux déclenche chez elle une crise de sanglots. De frêle larmes inondent son visage alors qu'elle se met à parler en Aymara.
Je sens ma gorge se serrer douloureusement. Alors que je lui caresse affectueusement le dos pour la consoler, de grosses larmes irrépressibles jaillissent de mes yeux et une grimace déforme ma bouche que j'essaye tant bien que mal de contrôler… trop d'émotions.
Nous pleurons toutes les deux, en nous regardant.
Une caresse sur la joue, un peu de douceur pour une mamie ayant trimé toute sa vie, et qui, au crépuscule de son existence, se retrouve dans la rue, tiraillée par la faim, mordue par le froid, oubliée par ses enfants, et ce, dans l'indifférence générale.
Une main chaude sur sa joue, et l'on ressent son atroce solitude, sa lutte quotidienne pour la survie.
Je pleure de rage contre tant d'injustice et d'inégalité, contre ma propre impuissance.
Il y en a tellement de ces petites mamies dans les rues de La Paz, mendiant toute la journée, et puis la nuit venue, se blottissant contre un mur, recroquevillées pour moins sentir le froid. D'autres choisissent de dormir dans le terminal de bus glacial, car il y a des WC.
Leurs familles les a abandonné car elles ont commis le double crime d'être vieilles et inutiles.
Un Monsieur ayant été témoin de la scène m'interpelle:
- De quel pays êtes-vous ? C'est bien, c'est très bien ce que vous faites !
Oui, et après ? La mamacita dormira tout de même dehors ce soir.
En rentrant à l'hôtel, je file consulter Internet pour voir s'il existe des structures d'aide pour anciens, une soupe populaire, un foyer d'accueil …
Rien. Il n'y a rien. De nombreuses associations s'occupent d'enfants orphelins, mais rien pour les aînés.
Ils sont indésirables.
Il faudrait de l'argent. De l'argent pour créer une structure pérenne, proposant gîte, couvert, et de l'amour. Beaucoup d'amour.

ITINERANCE-ANDINE
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