Alejandro Conuequir est un honorable vieux monsieur Mapuche
vivant depuis plusieurs générations dans la vallée
Trancura, en Araucanie chilienne. Il a passé ses jeunes années
à couper les arbres de la vallée pour l'industrie du bois
quand le travail manquait et que les consciences n'étaient pas encore
alertées par la nécessité de sauvegarder la biodiversité.
Aujourd'hui, il regrette ces années d'ignorance pendant lesquelles
il a « participé à la destruction de la forêt ».
Heureusement la coupe du bois est aujourd'hui strictement légiférée
et les forêts ont repoussé.
Alejandro s'est ensuite consacré à sa famille et au travail
de la terre. Comme tous les indiens Mapuches, qui ont été
évangélisés par les colons espagnols, il a conservé
ses traditions indigènes qu'il mêle de manière syncrétique
avec sa croyance en Dieu. Il célèbre ainsi avec ferveur le
Ngillatun, une fête Mapuche rituelle située dans un
lieu sacré, en pleine montagne. Cette célébration traditionnelle
a pour but d'implorer la clémence et l'aide de Dieu dans la vie quotidienne.
En échange, les Mapuches sacrifient un agneau, en entaillant profondément
sa poitrine et en arrachant à la main son cœur encore battant.
La moitié de l'agneau est ensuite grillée et partagée
lors de la cérémonie alors que l'autre moitié est donnée
à Dieu.
Par un processus d'emprunt sélectif, les Mapuches ont remplacé
les forces de la nature déifiées dans leur cosmogonie originelle
par le Christ, mais ils ne vont pas pour autant à l'église.
Alejandro porte d'ailleurs un regard critique sur la quête effectuée
par des prêtres opportunistes lors des messes dominicales.
Les croyances Mapuches revêtent également la forme de pensées
magiques. Alejandro nous raconte fièrement ses rêves, qu'il
assimile à des signes du ciel, durant lesquels Dieu lui parle et
lui intime l'ordre de célébrer un Ngillatun. Il est
pour cela très respecté au sein de sa communauté.