Voilà quelques années déjà que je partage
la vie de Delphine. Jusqu'à présent, notre histoire ne s'est
jamais trouvée sur un terrain instable ou une pente trop raide.
Nous sommes fait l'un pour l'autre. Delphine, tout comme moi, adorons
marcher en montagne. La cordillère des Andes paraissant être
un terrain de jeu fantastique, nous avons pris la décision de partir
une année ensemble pour parcourir ses sommets.
Mais comment notre couple allait-il appréhender une si longue promiscuité
? Certains me disaient que je ne finirai pas le voyage, d'autres, au contraire,
pensaient qu'avec beaucoup d'entretien, je passerai le cap.
Avant notre départ, un évènement incommodant joua
les oiseaux de mauvais augure. Nikita, la minette hysterico-caractérielle
de Delphine depuis une douzaine d'années, entreprit un beau matin
de m'uriner dessus! Que fallait-il voir derrière ce geste insolent
émanant d'un félin pour qui la propreté est un véritable
sacerdoce tant elle passe des heures à se toiletter ? Je considérai
cette pratique inconvenante comme de la jalousie et ne lui en tins pas
rigueur.
Nous partîmes donc à la conquête des sommets andins
et les premiers mois passèrent sans encombre. Les treks s'enchainaient
à un rythme soutenu, les jambes étaient lourdes, la fatigue
s'accumulait mais pas la moindre tension entre nous. Mieux, pour surprendre
ma dulcinée et casser la routine, je décidais même
à Huncayo-Pérou de me faire teindre en vert. Delphine semblait
heureuse, elle répétait souvent qu'elle ne s'était
jamais sentie aussi bien « dans ses baskets ».
Un changement de climat apparut avec le mois octobre. Nous avions abandonné
les hauts sommets pour nous retrouver dans la jungle amazonienne du parc
Machia, où je fus trainé dans la boue par Delphine pendant
un long mois... Pourquoi tant de haine ? Etait-ce mon odeur ammoniaquée
(merci Nikita) ? Gros coup de pompe. Ma vie devint un véritable
enfer, j'étais au point de rupture. Delphine envisagea notre séparation.
J'étais torturé, déchiré, et je pensais que
la fin de notre histoire était proche. Un jour d'accalmie, une
fée bolivienne se pencha sur moi et à l'aide d'incantations
indiennes et de ses mains expertes, elle put suturer mes plaies béantes.
Le calme était revenu, mais pour combien de temps ?