La
bolivie : Une évolution politique en accélération
A partir de 2000, de nombreux mouvements ont
agité la population. D'abord la "guerre de l'eau" dans la
région de Cochabamba, où la population s'est élevée
contre la privatisation de la distribution de l'eau confiée à
une multinationale états-unienne. S'y sont ajoutées les protestations
des paysans contre la non-application de la réforme agraire, malgré
la loi de 1996 qui prévoyait la légalisation des titres de propriété
sur plus de 100 millions d'hectares de terres rurales et la légalisation
des terres traditionnelles indiennes… L'ensemble de la population s'insurgeait
de voir accorder des centaines de milliers d'hectares de concessions
aux transnationales pétrolières et forestières et favoriser
la concentration des terres et les grandes exploitations de l'agrobusiness
tournées vers l'exportation (une centaine de familles possèderaient
25 millions d'hectares, selon le PNUD).
Par ailleurs, la politique d'éradication des cultures de coca, menée
par les Etats-Unis et les gouvernements boliviens des années 1990,
a suscité de nombreux affrontements violents. Bien qu’une part
non négligeable de la production de coca soit effectivement destinée
au narcotrafic (production de cocaïne), la criminalisation de la feuille
de coca (inoffensive) par la législation internationale et les politiques
de répression servant de couverture à une militarisation de
la région par les Etats-Unis ne sont pas acceptées par une population
indigène pauvre pour qui la culture et l'usage de la coca sont ancrés
dans les pratiques locales ancestrales. Elle est ainsi utilisée comme
plante médicinale, pour toutes sortes de maux, en particulier dans
le traitement du diabète, et fait partie de la plupart des cérémonies
andines.
C'est sur fond de mécontentement social qu'Evo Morales, ancien syndicaliste
paysan, défenseur des cultivateurs de coca, puis organisateur du Mouvement
vers le Socialisme (MAS), a bâti sa conquête du pouvoir. Il a
élaboré un programme social et anti-libéral porté
par les associations et syndicats du mouvement social : nationalisation des
secteurs-clés de l'économie (hydrocarbures, transports, télécommunications),
arrêt du paiement de la dette extérieure, défense de la
coca, plante emblématique de la culture indienne, fin de l'intervention
états-unienne et convocation d'une Assemblée constituante pour
redéfinir la nature de l'Etat et l'adapter à la réalité
pluriethnique de la nation.