Qu’a donc fait Matias pour finir « martyr » ? Après avoir grandi dans les quartiers populaires de la capitale, Santiago, il part à Temuco, centre du territoire ancestral mapuche, pour y étudier l’agronomie. Très vite, il s’engage dans les groupes de soutien aux prisonniers politiques. Ces prisonniers, au nombre d’une quinzaine, membres et dirigeants de communautés ou simples militants, furent, pour certains,condamnés à des peines de cinq à dix ans de prison ferme. Accusés « d’incendie terroriste » lors de procès où le gouvernement n’a pas hésité à appliquer une loi antiterroriste héritée de la dictature de Pinochet.

Depuis une dizaine d’années, de nombreux organismes internationaux ont pointé du doigt la criminalisation de la protestation sociale mapuche. L’État chilien pratique la politique de la carotte et du bâton.À ceux participant aux réseaux clientélistes des « partis pour la Démocratie » et des institutions, de maigres subventions sont octroyées. Par contre, une « place au chaud » dans les geôles chiliennes attend ceux qui élèvent la voix et récupèrent les terres spoliées. Ces terrains sont généralement aux mains de multinationales forestières ou de grands propriétaires fonciers. La case prison est précédée par de violentes perquisitions dans les communautés, durant lesquelles les carabiniers rudoient femmes, enfants et vieillards.
Mais la presse s’entête à parler de « violence mapuche » pour requalifier cette répression en « conflit ». Un conflit où tous les morts sont du côté mapuche. On évoque en priorité les risques de fuite des investisseurs, on s’apitoie sur le sort de ceux qui voient leurs milliers d’hectares encerclés et menacés par ces sauvages. Les paysans mapuche, eux, ne possèdent généralement pas plus de cinq hectares par famille. Ce sont les grands propriétaires, pour la plupart descendants de colons européens, qui font la loi dans ce Farsouth chilien. Nostalgiques de la dictature et se plaignant d’être abandonnés par le pouvoir central, ils ont formé des milices armées,suspectées de réaliser « des auto-attentats » pour justifier l’emprisonnement des dirigeants revendiquant leurs terres.
Descendants de ceux qui ont dû migrer à la ville, de plus en plus de jeunes partent à la reconquête de la dignité mapuche et des territoires ancestraux. Matias Catrileo était l’un d’eux. Certains sont en prison, d’autres dans la clandestinité. « Nous sommes un peuple qui a toujours vécu ici, qui est né ici et qui mourra ici », déclarait Matias, de façon prémonitoire, dans une vidéo aujourd’hui diffusée sur Internet (http://mapuche.free.fr).

ITINERANCE-ANDINE
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