Les
resistances indiennes
(© Ritimo, Ciip, septembre 2009)
Il y a de nombreux signes d’un renouveau
indien. Un signe d’abord démographique : alors que vers
les années 1650-1700 on pouvait craindre une disparition pure et simple
des peuples amérindiens, l’impensable se produisit à partir
de la moitié du XVIII° siècle, à savoir un sursaut
démographique spectaculaire, au point qu’actuellement, en ce
qui concerne tout au moins l’Amérique « Latine »,
la population amérindienne a retrouvé sa population initiale
de 50 millions d’êtres humains. Un sursaut qui traduit ce qu’on
a appelé la « résistance indienne silencieuse »
à l’entreprise systématique de déculturation et
d’acculturation forcées visant à les hispaniser et les
christianiser.
Les Amérindiens résistèrent très vite aux empiètements,
vols de terres, exactions, crimes des envahisseurs, avec leurs moyens souvent
dérisoires. Citons, entre autres : la grande rébellion,
de 1780 à 1782, qui secoua le sud du Pérou et la Bolivie, sous
la direction de Tupac Amaru, puis de Pedro Vilca Apaza et de Tupas Katari,
qui fut sur le point de libérer cette région du joug espagnol ;
les soulèvements des Mayas au Chiapas, au Mexique, dès l’arrivée
des Espagnols en 1532 et 1533 ; au Guatemala, se déclenchèrent
de nombreuses révoltes tout le XIX° siècle ; la Bolivie
vivra, de 1868 à 1900, une longue guérilla indienne.
Au Chili, les Mapuches réussirent à contenir victorieusement
– une exception !- les conquistadores espagnols à la hauteur
de Concepcion et du fleuve Bio Bio, arrachant par des traités une autonomie
territoriale. Et comment ne pas citer le grand soulèvement (levantamiento)
des Indiens d’Équateur au cours duquel des centaines de milliers
d’indigènes, appartenant à toutes les ethnies, défilèrent
calmement les 4 et 5 juin 1990 dans toutes les villes du pays. Ou encore la
fameuse révolte des Indiens du Chiapas, un certain 1er janvier 1994,
sous l’impulsion du sous-commandant Marcos : un véritable
coup de tonnerre… Chaque fois, la première revendication, vitale
est celle liée à la restitution des terres volées.
L’élection d’Evo Moralès, d’origine indienne,
à la présidence de la Bolivie en janvier 2006, est comme le
symbole de toutes ces résistances mais aussi de la reconnaissance du
monde indien. Cette élection a rendu possible une redistribution des
terres, mais elle a aussi exacerbé un racisme profond (septembre 2008 :
sept agriculteurs indiens ont été assassinés). Un moment
fort s’il en est un : le Forum social mondial de Bélem de
janvier 2009, au cours duquel plus de 2 000 Indiens présents ont
dénoncé les graves discriminations dont ils sont victimes, les
graves menaces que font peser les entreprises nationales et multinationales
sur leurs terres, leur santé…